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Genèse et legs des controverses liées aux programmes d’histoire du Québec (1961–2013) | Olivier Lemieux

Detalhe de capa de Genèse et legs des controverses liées aux programmes d’histoire du Québec (1961–2013)

S’engager à narrer le récit de l’enseignement de l’histoire au Québec est un défi de taille, considérant les conflits et les controverses que le sujet soulève. Lemieux s’y est intéressé dès son parcours doctoral et le présent livre en est un des résultats. La parenté entre ce livre et la thèse de Lemieux est frappante dans le meilleur des sens : la plume de l’auteur est assurée, le texte est limpide, les éléments sont bien sélectionnés, expliqués et résumés. Le texte est organisé autour d’une question clé : pourquoi l’enseignement de l’histoire nationale, tel qu’il est présenté dans les programmes officiels québécois, est-il au centre de controverses? Avec une telle question, on peut comprendre que Lemieux, dans son développement, doit s’attarder aux grands débats, aux enjeux de société et aux controverses ayant agité le Québec autour de ce sujet sensible.

Nous devons commencer par souligner la présence d’une préface élogieuse de Claude Corbo qui donne le ton au livre. Ce dernier est organisé autour de cinq chapitres, un premier expliquant la démarche menée par Lemieux pour retracer le fil conducteur permettant de répondre à sa question de recherche et les quatre suivants organisant les différents éléments constitutifs du récit qu’il brossera de l’enseignement de l’histoire.

Dans son premier chapitre, Lemieux nous présente les sources qu’il a consultées. Ce chapitre illustre l’une des forces de ce livre : ce qui aurait pu être un texte aride est mené très finement et entrecoupé de citations d’entrevues avec les personnes marquantes pour le développement des divers programmes, donnant un ton très intimiste au récit. Lemieux appuie aussi son raisonnement sur des extraits d’archives provenant de fonds de ministères, d’organismes et d’organisations ayant influencé le développement des programmes, ce qui lui permet d’organiser son récit selon les sept étapes du cycle politique (étapes qui nous sont expliquées dans ce même chapitre).

Au deuxième chapitre débute le recensement des différents programmes d’enseignement de l’histoire. Lemieux y relate la façon dont ceux-ci ont été élaborés. Ce deuxième chapitre permet de comprendre les éléments ayant mené au déploiement de la commission Parent, tout en brossant un portrait de la réalité politique de l’époque (et des groupes d’influence en place). On nous décrit le choix des commissaires et la réception des mémoires, les différentes philosophies de l’enseignement de l’histoire présentes à l’époque, l’élaboration des programmes de 1967 et de 1970, la réception de ces derniers par les enseignants et par la Société des Professeurs d’Histoire du Québec, l’impact de la crise d’Octobre ainsi que le début des réclamations pour la mise en place d’un cours d’histoire obligatoire au secondaire. Nous tenons à souligner qu’au deuxième chapitre, le texte est, pour la première fois dans le livre, entrecoupé de courts passages explicatifs et pertinents permettant, grâce au changement de ton, de préciser des éléments qui auraient pu échapper au lecteur. Il peut s’agir soit d’une précision d’ordre théorique soit d’extraits d’entrevues menées par Lemieux avec des personnages clés pour l’histoire qu’il relate.

Le troisième chapitre s’intéresse au livre vert, à ses origines, à son impact, et à la façon dont celui-ci s’inscrit dans la mouvance des années 1970. Ce livre a encouragé la réflexion et la discussion, en lien avec la consultation publique de l’époque qui a mené au livre orange. Ce dernier proposait plusieurs mesures, entre autres une refonte des programmes du primaire au secondaire ouvrant la porte à l’élaboration du programme de 1982. Lemieux retrace la constitution du comité de consultation et de production de ce dernier programme tout en humanisant son récit à l’aide de témoignages. Le chapitre se clôt sur les débuts difficiles de l’épreuve unique.

Le quatrième chapitre s’intéresse au rapport Corbo, aux consultations des États généraux, au groupe Lacoursière et au rapport Inchauspé, menant à l’élaboration du programme de 2006. Cela permet à Lemieux d’enchainer sur l’accueil de ce programme ainsi que sur la controverse de 2006. Encore une fois, l’écriture est entrecoupée de précisions, permettant de bien saisir les tensions entre les divers groupes d’influence et les mouvements de pensée en place.

Le cinquième chapitre permet une analyse du récit élaboré dans les trois derniers chapitres en termes de continuités et de ruptures sur les différents moments décisifs du récit : les consultations, l’élaboration des programmes d’éducation et la réception de ces programmes d’histoire par le milieu scolaire et populaire.

Le livre se termine par une réflexion sur l’impact du concept de l’« air du temps » sur l’élaboration (et la réception) des programmes de formation. Nous terminerons cette analyse en insistant sur la facilité de lecture du livre. Si le propos est très sérieux, son traitement le rend accessible au lecteur et le choix de faire des insertions permet, même sans connaissances de fond dans les théories abordées, de prendre du recul et d’avoir une lecture itérative entre la théorie et l’analyse de Lemieux. Ce livre, étant une version abrégée de la thèse de l’auteur, reste simple et facile d’accès pour le lecteur. Il offre une synthèse très complète des controverses et des mouvements de pensée qui se sont développés au Québec et il permet une lecture intéressante des groupes d’influence actuels. La présence de témoignages issus des entrevues de Lemieux donne aussi un visage humain à ces événements et rappelle l’aspect, parfois artisanal, qu’ont pu prendre certains phénomènes ayant passé à l’histoire. Ce livre intéressera le grand public ayant un intérêt pour l’enseignement de l’histoire et les chercheurs ainsi que les enseignants en formation et en exercice.


Resenhista

Laurie Pageau. Université Laval.


Referências desta resenha

LEMIEUX, Olivier. Genèse et legs des controverses liées aux programmes d’histoire du Québec (1961–2013). Québec : Presses de l’Université Laval, 2021. 186p. Resenha de: PAGEAU, Laurie. Historical Studies in Education. Vancouver, v.31, n.1, 2022. Acessar publicação original.

Itamar Freitas

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