Enseigner l’histoire à l’heure de l’ébranlement colonial. Soudan, Égypte, empire britannique (1943-1960) – SERI-HERSCH (CEA)

SERI-HERSCH Iris. Enseigner l’histoire à l’heure de l’ébranlement colonial. Soudan, Égypte, empire britannique (1943-1960). Paris: IISMM – Karthala, 2018. 382p. Resenha de: MATASCI, Damiano. Cahiers d’Études Africaines, v.240, p.1042-1044, 2020.

Version remaniée d’une thèse de doctorat soutenue en 2012 à l’université d’Aix-Marseille, cet ouvrage, rédigé par Iris Seri-Hersch, propose une analyse fascinante et empiriquement bien étayée de l’enseignement de l’histoire tel qu’il était dispensé au Soudan colonial entre 1943 et 1960. Ce sujet est abordé à partir d’une perspective de recherche qui mérite d’emblée deux considérations générales. Tout d’abord, l’auteure se focalise principalement sur les contenus et les prescriptions officiels associés à cette discipline scolaire, plutôt que sur les usages sociaux des manuels ou les réceptions des élèves. Son but est de montrer toute la pertinence de s’intéresser (encore) au point de vue des colonisateurs, pariant sur le potentiel heuristique d’une approche méthodologique mettant en lumière les effets recherchés de l’entreprise éducative coloniale. À cet égard, Iris Seri-Hersch rappelle que l’histoire de cette dernière est riche en paradoxes, car contrairement à certaines lectures « postcoloniales » parfois trop hâtives, l’éducation n’a pas comme seul et unique objectif l’uniformisation culturelle et le gommage de l’identité des colonisés. Ensuite, la période au cœur de l’enquête, celle de l’« ébranlement colonial », terme qui est préféré à celui de « décolonisation », jugé trop linéaire et théologique, présente un grand intérêt. Les années qui suivent la fin de la Seconde Guerre mondiale sont en effet marquées par une grande incertitude quant à l’avenir des territoires africains, ce qui favorise les expérimentations et les réformes pédagogiques. Elles se caractérisent aussi par un tournant « paternalo-progressiste » de la politique coloniale, de plus en plus influencée par l’idéologie du « développement ». Iris Seri-Hersch restitue donc l’importance, encore quelque peu négligée par l’historiographie, des enjeux éducatifs au moment culminant de la « crise des empires », mettant notamment à jour les liens entre une discipline scolaire — l’histoire — et le processus de construction nationale au Soudan.

On l’aura compris, ce livre se situe à la croisée de plusieurs champs historiographiques et amène des éclairages inédits, non seulement sur l’histoire du Soudan mais aussi, plus largement, sur la production des savoirs coloniaux, sur la didactique de l’histoire et sur les réalités multiformes de l’éducation (post)coloniale. Les deux premiers chapitres présentent le contexte — politique et éducatif — dans lequel s’inscrit la trajectoire scolaire soudanaise, rendue particulièrement intéressante par le statut de ce territoire, un condominium soumis à la double tutelle britannique et égyptienne. Ils apportent au lecteur, notamment au non-spécialiste, les éléments de compréhension nécessaires pour aborder le cœur de l’ouvrage, à savoir le contenu et les modalités de l’enseignement de l’histoire dans les écoles primaires, qui est de loin la filière la plus fréquentée durant l’époque coloniale. L’étude se focalise tout particulièrement sur l’analyse des programmes pensés et élaborés après la Seconde Guerre mondiale (chapitre 3), sur le système de valeurs et les représentations du passé qui y sont transmises (chapitre 4), ainsi que sur les modalités de communication, d’apprentissage et d’évaluation de l’histoire scolaire (chapitre 5). Enfin, un dernier chapitre compare le cas soudanais avec celui d’autres colonies et de la Grande-Bretagne. De cette analyse serrée et bien menée se dégagent, tout d’abord, les particularités du type d’histoire prescrit aux autochtones. Contrairement à une image reçue, celui-ci ne véhicule pas nécessairement un message univoque où le passé africain serait négligé ou effacé. Comme l’ont récemment montré Céline Labrune-Badiane et Étienne Smith pour l’Afrique occidentale française, l’enseignement est adapté aux contextes locaux et aux connaissances pratiques des élèves1.

Ainsi, l’histoire dispensée dans les écoles est à la fois celle des colonisateurs et des colonisés, les programmes incluant des sujets relevant de l’histoire « mondiale », européenne, islamique et soudanaise, allant de l’Antiquité à l’ère contemporaine. Encore plus surprenant, le thème de la lutte anticoloniale y est fortement présent. Celle-ci, toutefois, ne se traduit pas par une critique directe du condominium anglo-égyptien (qui n’est par ailleurs pas véritablement intégré au passé historique), mais vise plutôt les envahisseurs ottomano-égyptiens du XIXe siècle et renvoie à des héros et à des figures mythiques comme Guillaume Tell. Quant à l’histoire du Soudan, elle est mise en récit suivant un enchevêtrement de perspectives nord-soudanaises et britanniques : les équipes chargées de l’élaboration des programmes et des manuels n’incluent pas d’acteurs sud-soudanais ou égyptiens et doivent composer avec les objectifs politiques des autorités britanniques de Khartoum, hostiles à une éventuelle unification du Soudan avec l’Égypte. C’est donc pour des raisons pragmatiques que les éducateurs coloniaux s’attellent — par le biais d’un enseignement de l’histoire s’adressant à la population musulmane arabophone et ignorant les minorités religieuses et linguistiques — à alimenter un nationalisme soudanais « indépendantiste » et à accompagner la transition du pays vers une modernité post-impériale.

3Iris Seri-Hersch inscrit aussi la trajectoire scolaire soudanaise dans le contexte plus large de la fin de l’Empire britannique, afin d’en dégager les spécificités et les similarités avec d’autres colonies africaines (Ouganda, Rhodésie du Nord, Nigeria), l’Inde, l’Égypte ou encore avec l’enseignement en métropole. Particulièrement avisée, cette démarche comparative a l’avantage de rendre compte de la grande diversité des situations et des multiples finalités de l’histoire scolaire. Elle permet également de « connecter » l’exemple soudanais à des débats qui dépassent largement le cadre d’une seule colonie ou d’un empire. Rapidement évoquée par l’auteure, cette question mériterait par ailleurs d’être approfondie. Il serait en effet intéressant de retracer les circulations transimpériales — d’idées, de modèles et d’individus — qui ont accompagné l’élaboration des manuels d’histoire soudanais, ainsi que de savoir comment les expériences en cours dans d’autres territoires ont servi de référence ou de repoussoir. Une telle ouverture entrerait aussi en écho avec les appels récents, issus notamment du monde académique britannique, invitant à décentrer l’étude du fait colonial et à placer dans un seul cadre analytique les dynamiques de connexion, de rivalité et de coopération qui ont émaillé l’expansion européenne et la fin des empires.

Avec les dimensions circulatoires, l’examen de la période postcoloniale constitue une autre piste de recherche prometteuse. Comme le rappelle justement Iris Seri-Hersch dans ce livre et dans ses autres travaux sur le sujet, l’indépendance ne marque pas nécessairement une rupture quant au contenu et à l’usage des manuels coloniaux. Dans le cas du Soudan, la reconfiguration des programmes précède l’accès à la souveraineté nationale, les textes scolaires ne subissant par ailleurs pas de changements particuliers jusqu’aux années 1970. À nouveau, l’auteure donne à voir la complexité et les paradoxes qui caractérisent le fait éducatif (post)colonial, laissant entrevoir ses multiples répercussions jusqu’à nos jours. Les conclusions de l’ouvrage sont en effet particulièrement instructives pour comprendre la situation actuelle. À la question de savoir dans quelle mesure l’enseignement de l’histoire au cours de la période coloniale tardive a pu contribuer à la scission du pays en 2011, Iris Seri-Hersch répond avec une hypothèse captivante : les représentations de l’histoire soudanaise dans les manuels coloniaux, utilisés pendant des décennies, auraient participé à renforcer le fossé social et culturel opposant les Khartoumois (britanniques et nord-soudanais) aux populations des périphéries (Darfour, Monts Nouba, Sud-Soudan), favorisant de ce fait la remise en cause, dès 1956, de la nature même de l’État postcolonial soudanais.

Notes

1 C. Labrune-Badiane & É. Smith, Les Hussards noirs de la colonie. Instituteurs africains et « petites patries » en AOF (1913-1960), Paris, Karthala, 2018.

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Fé, Guerra e Escravidão: Uma história da conquista colonial do Sudão (1881-1898) | Patrícia Santos

Em sua obra, Patricia Teixeira Santos abre caminhos para uma abordagem comparativa da história do Sudão ao analisar as relações entre cristãos e muçulmanos na região que compreende as atuais regiões do Sudão e do Sudão do Sul, focando nos alcances que os contatos entre diferentes grupos – que serão discutidos mais adiante – possibilitaram ou dificultaram. Para tanto, utiliza como fontes cartas e relatos de missionários católicos durante o período em que foram prisioneiros do governo da Mahdiyya. Santos contribui, com seu trabalho sobre fins do século XIX, para as perspectivas de análise das atuais discrepâncias e conflitos da região, objeto de interesse deste trabalho.

Santos escolhe o período da Mahdiyya (compreendido entre 1881 e 1898) como recorte temporal, porque o vê como um complexo cruzamento de universos histórico-culturais e como um momento de articulação de diferentes realidades políticas. Como sugere o título de sua obra, os caminhos pelos quais a discussão do governo do mahdi perpassa, são: fé, guerra e escravidão, aspectos estes considerados importantes para analisar a história do Sudão e a relevância desses três temas para suas questões políticas atuais. A autora coloca o mahdismo no caso sudanês como um movimento messiânico social e político, centrado na construção de uma ordem política e social baseada no poder carismático do seu líder (o mahdi). É importante observar o período deste Estado mahdista como significativo devido à sua continuidade na constituição do Estado nacional sudanês, pela permanência de formas de governabilidade, de redefinição de identidades e de redistribuição de poder e prestígio.

A região que hoje pertence ao Sudão e ao Sudão do Sul possui inúmeras “camadas” em sua história, tornando-se de uma enorme complexidade. Portanto, entendemos que para melhor compreendê-la hoje, é preciso compreender também as diversas formas que assumiu e assume. Assim, dos processos de migração árabe para a região, que tiveram maior intensidade durante o século XIV, percebemos o início de uma intensa interação entre as culturas e religiões muçulmanas e as sociedades cristãs sudanesas (Ibrahim, 2010, pp. 77-98), que viriam a refletir imensamente nas questões políticas futuras. Já nas primeiras décadas do século XIX, guerras locais e instabilidade política deram abertura para a incursão de Muhammad Ali, então vice-rei do Egito, que objetivava anexar o Sudão aos seus territórios. Patricia Teixeira Santos sugere, em seu primeiro capítulo, que Muhammad Ali teria se aproximado – em diferentes aspectos, como religião, economia e formas de poder – da França e de outras potências europeias, na tentativa de atingir uma autonomia inédita do Egito em relação aos impérios europeus. (2013: 34). Para Eve Powell (apud Santos, 2013: 36), esse momento de dominação egípcia tentou rearranjar o Sudão e dar à região uma nova cara, vendo o Sudão como uma colônia dentro de um projeto mais amplo de ações imperiais tentadas pelo Egito, que seriam suprimidas mais adiante. Com isso, o Sudão sofreu o primeiro período daquilo que se aproxima de uma forma de dominação colonial, com a imposição de um governo “turco-egípcio forte e de autoridade soberana e incontestada, pelo direito de conquista”, chamado de Turkiyya, compreendido entre 1821 e o início da década de 1880 (Mamdani, 2009).

Segundo Ibrahim, a intervenção turca modificou a sociedade sudanesa tradicional, suscitando descontentamento, mas por si só não conseguiu reverter ou reorganizar suas estruturas. Para este autor, seria somente com o mahdi que os sudaneses poderiam se rebelar em massa, dando lugar a um Sudão independente, que logo enfrentaria o imperialismo britânico. Ainda segundo Ibrahim, no sul, ataques de captura de escravos, pilhagens e rapinas prosseguiram de qualquer forma, tornando o que era uma estrutura de domínio socioeconômico em “uma estrutura de domínio racial que deu lugar a uma ideologia de resistência racial entre os africanos do Sudão Meridional” (2010: 433-444).

A partir do exposto por Ibrahim, é possível voltar ao texto de Santos a fim de estabelecer algumas conexões e distanciamentos a respeito do período inicial da Mahdiyya no Sudão. A autora lembra a distinção através da categoria de raça durante o domínio dos povos sudaneses pelos egípcios (estes se referiam àqueles como abd, que significa escravo/negro, ou núbio), iniciando um processo de diferenciação que segregava, produzindo um discurso de superioridade em relação ao “outro” construído (2013: 39). As distinções raciais, segundo a autora, eram feitas com base na cor da pele, no comportamento sexual e nas atitudes religiosas. Esse processo de submissão, marcado pela diferenciação racial, criou também a submissão em relação ao trabalho, onde as populações não muçulmanas eram coagidas ao trabalho na lavoura de exportação, gerando nas populações e lideranças locais um forte sentimento de descontentamento e revolta, como apontou também Ibrahim.

É nesse contexto que se estabelece, em 1881, o mahdi no Sudão. Santos lembra a busca de alianças do mahdi com os povos não muçulmanos em torno de um inimigo comum, que seria o domínio otomano-egípcio. No mesmo sentido de Ibrahim, Santos afirma que a estruturação do movimento mahdista, capitaneado por Muhammad Ahmad, criou um espaço de interação entre os povos sudaneses, fazendo convergir diferentes conflitos que, acompanhado da fragilidade do domínio otomano-egípcio, resultou em ações integradoras entre as diferentes populações. Desta forma, percebe-se que os grupos étnicos [2] são fundamentais para os processos destacados. Os relatos dos missionários, assim como os dados etnográficos de Evans-Pritchard citados por Santos, que viam os “nativos” ora como “belicosos e não confiáveis”, ora como “atrevidos e guerreiros” (Santos: 77), apontam para a ideia que a autora lança no início do texto, a de que a empresa colonial não tinha certeza dos rumos para os quais seguia, assim como para a noção de que o domínio colonial não era inexorável [3]. Santos aponta para a importância dessas populações locais nos processos de resistência e de luta, como por exemplo o papel dos nuer nas reações contra as razias otomano-egípcias, a proximidade maior dos povos dinkas com os missionários católicos, as redes de solidariedade que se estabelecia entre esses últimos contra outros povos, entre outras (Santos: 82-99).

Santos relembra os estudos de D. H. Johnson para afirmar a necessidade de se redimensionar o papel dos líderes religiosos sudaneses, a fim de analisar como conseguiram possibilitar a inserção e sobrevivência dos grupos nas três principais experiências políticas, religiosas e econômicas de controle sobre as populações, quais sejam: o domínio otomano, a Mahdiyya e o condomínio anglo-egípcio (2013: 84). É interessante pensar esses diálogos como uma forma de fugir à ideia generalizante de fundamentalismo, dando espaço às especificidades da região [4]. Santos afirma que as identidades étnicas e as relações de poder e de ocupação da terra ganharam diversas significações diante dos processos de interação, acomodação, sujeição e dos enquadramentos que foram realizados para a sobrevivência em contextos de grande interferência política como os aqui elencados. Assim, a escravidão pode ser vista como um elemento de convergência entre esses povos, a exemplo disso, a união dos dinka e shilluk contra os baggara, traficantes de escravos nômades (Santos, 2013: 87-88).

Ainda nesse sentido, o que se observa hoje ao se estudar as estruturas políticas sudanesas pode ter como uma das primeiras manifestações, de acordo com a autora, as zeribas [5] , que estabeleceram ou reforçaram fronteiras entre diferentes povos do sul do Sudão, concorrendo amplamente com as missões cristãs, que buscavam agrupar os grupos étnicos, principalmente os dinka, em torno do projeto civilizatório católico, que acabou por se desfazer devido à maior adesão desses povos à Madiyya, pelo forte caráter de pregação que o mahdi conseguiu estabelecer entre os povos não muçulmanos (Santos, 2013: 88) [6].

As divergências entre grupos religiosos, analisadas por grande parte da historiografia acerca da história do Sudão, também são analisadas por Patrícia Teixeira Santos. Parte dos grupos nuer e nuba recusavam o islamismo, uma vez que os baggara eram muçulmanos. De tal maneira, inicia-se o processo de consolidação de uma oposição, reforçada pelo missionarismo em sua prática cotidiana e em seus relatos, que é a de “povos negros” versus “povos islamizados”, levada adiante pelo domínio colonial anglo-egípcio (período entre 1898 e a independência do Sudão, ocorrida no início de 1956) e estendida até os dias de hoje [7]. De acordo com Mamdani, os processos de violência no Sudão atual, a exemplo do genocídio desenrolado durante os conflitos, têm como ponto de origem esse legado colonial de divisão em “tribos”. Outro motivo apontado pela autora, no decorrer do último capítulo, para o reforço dessa oposição pautada em conceitos de raça é o fato de que, durante o condomínio anglo-egípcio, oficiais de origem otomana, egípcia e do norte do Sudão ganharam postos comerciais e de “repressão ao tráfico” na província de Cordofan, ao mesmo tempo em que apoiavam o comércio escravista, gerando um aparato que potencializava o comércio de escravos. Além disso, lembra a campanha de combate à escravidão realizada por militares e agentes consulares europeus, que culpabilizava a figura do traficante “árabe muçulmano” como responsável por todas as questões relacionadas ao tráfico e à dominação dos povos africanos, ignorando a aparição, nas fontes, de personagens europeus – representantes oficiais ou não-oficiais da administração colonial – ligados ao tráfico.

Patrícia Teixeira Santos reforça, em sua conclusão, que dentro do contexto de transformações pelo qual passou o Sudão no período da Mahdiyya, sufis e cristãos europeus católicos conseguiram encontrar seu lugar em meio às disputas e interseções entre religião e economia no sul do Sudão. Essas interações se criavam de forma bastante porosa, permitindo movimentações e buscas de diferentes possibilidades, principalmente na negociação com o domínio otomano-egípcio (2013: 297). De qualquer maneira, a autora considera importante analisar o período do mahdi como um momento que conseguiu congregar e estabelecer uma série de relações entre diferentes grupos, como traficantes, povos nômades, ordens sufis e grandes comerciantes do Sudão, levando à constituição de um Estado que produziu ele mesmo essas diferentes categorias de sujeitos, que influenciavam na dinâmica da sociedade sudanesa. Isso possibilitou a integração de diversos elementos da experiência religiosa na política, ou seja, na criação de um estado islâmico, que levou à produção de “novas concepções a respeito de fronteiras, do sagrado e da assimilação e reelaboração de experiências políticas e culturais europeias”. Essas questões apontam, de acordo com Santos, para a singularidade do mahdi e à longevidade desse Estado (2013: 299). Cabe ressaltar, a fim de conclusão, a importância que as discussões provocadas pelo estudo de Patrícia Teixeira Santos podem adquirir para além das análises dos conflitos sudaneses e sul sudaneses, podendo ser utilizado para novos trabalhos quem pensem vieses mais globais, que engendram discussões envolvendo tradição e modernidade, ou o fundamentalismo atual, por exemplo. Estes temas aparecem, vez ou outra, com maior intensidade, principalmente quando retratados a partir de perspectivas engessadas, construídas fora do eixo sul-mundo, tornando necessárias novas análises, para as quais Patrícia Santos nos serve de exemplo.

Notas

2. Santos se refere às populações de origem dinka, nuer, shilluk, niam niam, nuba e bari (2013: 77), cuja discussão não cabe na proposta deste trabalho. Para aprofundar os estudos sobre grupos étnicos, suas definições e a forma como se explicam suas fronteiras, ver Barth. BARTH, F. Os grupos étnicos e suas fronteiras. In: O guru, o iniciador e outras variações antropológicas. Rio de Janeiro: Contra Capa Livraria, 2000, pp. 25-67.

3. Para uma leitura sobre as intenções coloniais e suas políticas criadas nas colônias, ver COOPER, F. Repertorios imperiales y mitos del colonialismo moderno. In: Imperios: una nueva visión de la Historia universal. Barcelona, Crítica, 2011, pp. 391-446.

4. Mahmood Mamdani também se insere nessa discussão ao afirmar o erro das divisões coloniais, que categorizavam as populações sudanesas em grupos baseados na questão religiosa e de terra.

5. As zeribas eram fortificações utilizadas inicialmente para o estoque do marfim sudanês que seria levado para o Egito. Porém, com o aumento do tráfico de escravos, passaram a servir de local de pouso para os escravos, e com o rendimento desse negócio, os traficantes passaram a submeter as populações próximas aos impostos e ao trabalho nas zeribas (Santos, 2013: 87-88).

6. A autora destaca a relativa emergência das zeribas, as disputas regionais por mercado e poder e a deserção de soldados das tropas otomano-egípcias como fundamentais para uma maior adesão ao mahdi, que conseguiu criar uma nova forma de organização social, a fim de suplantar os laços entre otomanos, egípcios e outros povos do Sudão.

7. Com o acesso às fontes missionárias, no final do século XIX, destaca-se o uso de “categorias como “bárbaro”, “ansar”, “negro”, “árabe”, “branco”, criando novas e singulares enunciações que marcaram o processo genealógico do racismo que as práticas normatizadoras da administração anglo-egípcia incorporaram e reforçaram a fim de construir uma ordem, através da gestão de uma hierarquia de distinções raciais baseadas em pressupostos biológicos, religiosos e “civilizacionais” (Santos, 2013: 303). A Igreja, cumprindo seu papel como mediadora desses processos, cria, dentro do espaço da educação, a possibilidade de hierarquizar as diferentes populações do Sudão nas categorias supracitadas – às populações negras “não árabes” foram delegados os trabalhos manuais e agrícolas, e aos muçulmanos e cristãos do norte a integração na administração colonial, inserindo essa forma de controle na lógica do domínio colonial (Santos, 2013: passim). A partir disso, pode-se pensar como essas categorias, estáticas e em grande parte pautadas em definições racistas, são utilizadas até hoje, para definir e “entender” as diferentes formas de relações políticas e sociais no Sudão e no Sudão do Sul. Na obra citada anteriormente, Mamdani (2009: 06) cita o processo que chama de “racialização” realizado pela empresa colonial no Sudão, ao qual se pode responsabilizar o quadro da violência atual, que colocava a oposição entre “árabes de pele clara violentando negros africanos”, resultando na criação de oposições entre o que o autor chama de “identidades tribais”.

Referência

BARTH, F. Os grupos étnicos e suas fronteiras. In: O guru, o iniciador e outras variações antropológicas. Rio de Janeiro: Contra Capa Livraria, 2000.

COOPER, F. Repertorios imperiales y mitos del colonialismo moderno. In: Imperios: una nueva visión de la Historia universal. Barcelona, Crítica, 2011.

IBRAHIM, H. Iniciativas e resistência africanas no nordeste da África. In: BOAHEN, A (org.). História Geral da África, vol. VII. São Paulo: Editora Ática, 2010.

MAMDANI, M. Saviours and Survivors: Darfur, Politics and the War on Terror. Cidade do Cabo: HSRC Press, 2009.

Suellen Carolyne Precinotto – Atualmente mestranda no Programa de Pós-Graduação em História da UFPR. Graduanda na UFPR quando a resenha foi aceita.


SANTOS, Patrícia. Fé, Guerra e Escravidão: Uma história da conquista colonial do Sudão (1881-1898). São Paulo: Fap-Unifesp, 2013. Resenha de: PRECINOTTO, Suellen Carolyne. Cadernos de Clio. Curitiba, v.8, n.1, p.115-123, 2017. Acessar publicação original [DR]

é, guerra e escravidão: uma história da conquista colonial do Sudão (1881-1898) | Patrício Teixeira Santos

A obra Fé, Guerra e Escravidão: uma história da conquista colonial do Sudão (1881-1898), recém editada pela Editora FAP-UNIFESP, trata de um tema atual, instigante e ainda pouco explorado pela academia brasileira, seja pela dificuldade do acesso às fontes, seja pelo tardio interesse pelos estudos periféricos, como podem ser considerados os estudos africanos e asiáticos.

Este é um duplo desafio que a autora aceita magistralmente: vai em busca das fontes e traz a público e para a academia a premência da dedicação aos estudos ainda pouco abordados, o que significa também dizer da necessidade de criar um campo conceitual e teórico específico, que não seja uma mera transposição dos estudos realizados na Europa ou nos EUA, para tratar do continente africano.

O tema é instigante e atualíssimo, se considerarmos todas as veiculações da mídia acerca dos acontecimentos da chamada Primavera Árabe e seus desdobramentos e explicações que passam pela simplicidade de rótulos: fanatismo, intolerância, ignorância, fundamentalismo ou, simplesmente, islamismo. Há ainda um aspecto contundente desta história recente: a criação, em 2011, do 195° país do mundo: o Sudão do Sul, de maioria cristã, desmembrado do Sudão, de maioria muçulmana.

Notadamente, o ponto de partida da obra são as relações entre cristãos e muçulmanos no Sudão no período compreendido entre 1881 e 1898, correspondendo à experiência da instauração de um Estado Islâmico em decorrência do movimento mahdista, liderado por Mohammad Ahmad Abdulahi.

Partindo de sua pesquisa de doutorado, a autora revisitou sua obra com a realização de pesquisa de pós-doutoramento que a levou a recolher documentos, pesquisar em diferentes acervos e bibliotecas e ainda refletir com colegas de universidades internacionais para chegar ao formato final de sua pesquisa, que ora se publica em formato de livro.

A originalidade está não só na escolha do tema como na seleção das fontes e suas interpretações, abrindo caminho para a construção e consolidação do campo de estudos de História da África no Brasil, indo além das questões, não menos importantes, dos temas diaspóricos ou relacionados à história do Brasil.

As fontes são ricas e variadas: relatos e cartas de missionários, depoimentos e discursos das fontes missionárias, manuscritos, periódicos e outras publicações missionárias, fonte oral, além da documentação produzida por militares e comerciantes europeus, documentação produzida pelos muçulmanos no Sudão e importantes obras bibliográficas de referência e de cunho geral.

Tais documentos permitem tratar das formas de pensar, do juízo de valores, das percepções e das formas de convivência com o outro, ou dito de outra forma, de como ver o outro. É tratar ainda das representações recíprocas de cristãos e muçulmanos, não apenas a partir da história destas relações, mas como esta história foi construída, elaborada e apropriada. E, logicamente, há uma discussão historiografia sobre as formas de escrita desta história.

Ainda que o tema central seja o surgimento da Mahdiyya e do Estado Mahdista liderado por Mohammad Ahmad Abdulahi, há uma pluralidade de temas interrelacionados, interligados, intricados e que, pelas mãos da autora, dialogam, no melhor exemplo do que se espera da disciplina histórica. Trata-se da História do Sudão no século XIX, mas também da história do Império Turco-Otomano e de sua crise ensejada pela disputa com a Áustria e a França (esta vista como a protetora dos cristãos do Oriente); da história do colonialismo europeu dos séculos XIX e XX, marcado pelas disputas francesa e inglesa, mas também do “subimperialismo” egípcio na tentativa de dominação do território sudanês; da história da Igreja e de seu papel na corroboração do projeto imperialista europeu, seja nas tentativas de evangelização da África, seja na forma de encontrar seu novo papel no momento da formação e consolidação dos laicos Estados nacionais; da disputa pela expansão da fé pelas missões católicas em concorrência com os cristãos orientais (coptas e ortodoxos) e com os protestantes ingleses; da expansão islâmica pela vertente do sufismo e do mahdismo; das interpretações da história sobre a história do Sudão, do sufismo e do mahdismo, num contexto de fé, guerra e escravidão.

O objetivo da obra é analisar as visões construídas sobre o mahdi e o Estado Islâmico criado no Sudão, a partir das interações dos missionários com essa experiência histórica. A partir daí, discute-se o papel da religião na formação da nação sudanesa, como reação ao poderio colonial anglo-egípcio, cujo caminho escolhido será o do messianismo e do poder estatal. É neste contexto que se insere o papel do catolicismo e das ações missionárias como “mediador espiritual do laico projeto colonial britânico e do novo estado religioso”. Trata-se então de compreender os valores civilizacionais cristãos na implementação do Estado sudanês.

A obra está estruturada em quatro capítulos, cada um deles subdivididos na exploração de temas que, num crescendo, vão descortinando a complexidade e pluralidade desta história: imperialismo e subimperialismo; sufismo, misticismo, mahdismo e messianismo; cristianismo, ação missionária e colonização; a trajetória do mahdi e o processo de criação do Estado Islâmico, assim como de seu significado histórico e religioso e as interpretações historiográficas sobre esse significado. Entre os temas abordados e analisados, alguns aspectos instigantes podem orientar a leitura, que ora apresentadas não estão por ordem de importância nem seguem à risca a construção feita pela autora.

O primeiro aspecto trata do papel das missões católicas europeias no Sudão, não voltadas apenas às ações proselitistas, mas como necessidade e garantia da própria sobrevivência institucional da Igreja fora da Europa, em decorrência da separação da Igreja e do Estado e dos processos de laicização. Dessa forma, África e Ásia serão campos de disputa para a expansão da fé católica, sendo necessária a conquista de almas, para isso concorrendo não só com os muçulmanos, mas com outras formas cismáticas de cristianismo (o oriental, como os ortodoxos e os coptas, e o protestante), como também para a perpetuação institucional e ideológica da Igreja Católica. Nesse sentido, o discurso do branco-europeu-civilizador foi incorporado também pela Igreja num processo interativo entre missão-colonização, cujo papel se traduziu na ação civilizatória católica entre povos não-brancos e pela propagação do “fim da maldição de Cam” com a redenção de todos os povos, africanos inclusive, pelo sangue de Cristo.

Para a efetivação desse projeto era necessário desqualificar o outro, construindo uma visão do muçulmano na lógica do estereótipo do oriental: indolentes, maliciosos, perversos, imersos na preguiça oriental, invejosos, competitivos, violadores das liberdades, do direito e do progresso, traficantes, brigões, ladrões, fracos, supersticiosos, entre outras adjetivações que corroboram a construção da imagem do outro na Europa branca-civilizada. A ridicularização, a violência, a fraqueza e a ignorância também eram modos de desqualificar o outro. Era necessário ainda desqualificar o islã, o profeta e seus crentes: “Maomé não era outra coisa senão um profeta do diabo, o seu livro um acúmulo de erros, e os amuletos uma vã superstição” (p. 153). Sobre as mulheres também pesava a degradação pela barbárie, pela sedução da magia e do encantamento, pela superstição e pela religião, como na seguinte passagem: “Perguntei se porventura aquela mulher era louca, e me respondeu que era muçulmana” (p. 153).

Assim, o campo de ação missionária deveria ser justamente onde esses males pudessem ser combatidos por meio da conversão à fé católica, unindo projeto evangelizador com projeto civilizador no Sudão: os resgatados da escravidão, as mulheres e as crianças. A conversão missionária se daria pela salvação dos escravizados, longe do jugo de seus senhores; das mulheres, libertas da escravidão, do concubinato, da prostituição; das crianças abandonadas como resultado do “abuso e da não consciência do homem branco”. Estes seres degradados poderiam ser regenerados pela ação missionária, por meio do controle do corpo e da sexualidade como formadores de virtudes, seja pelo casamento católico, seja pela inserção na vida monástica e, sobretudo, seriam agentes propagadores da fé e moral católica como forma de expressar sua gratidão, docilidade e submissão.

Nesse sentido, a ação do mahdi e sua construção de um Estado Nacional Sudanês baseado na fé islâmica só poderia ser compreendida como desvario, farsa, delírio, messianismo de um líder inconformado com “a presença europeia, avesso às inovações modernas e às contribuições científicas e religiosas do Ocidente” (p. 164)

Ainda que possa parecer paradoxal, do ponto de vista religioso há uma convergência entre os objetivos da missões católicas e do Estado mahdista no tocante à obra civilizatória sobre as “populações negras africanas” e “não árabes” empreendida pelo mahdi, que iam ao encontro da moralidade cristã no que se refere à disciplinarização dos corpos, controle da sexualidade, amor ao trabalho, combate ao adultério e ao roubo, com uma eficiência pedagógica e disciplinadora, baseadas na punição e nos castigos físicos.

Da mesma forma, o Estado mahdista se utilizou do mesmo expediente da conversão dos missionários católicos por meio da combinação da sedução e da coerção, do amplo conhecimento da fé católica, de aventar a possibilidade de participação no Estado, mas também por meio da força física, da conversão forçada, da imposição dos casamentos, da disciplinarização dos corpos, entremeando sensações e experiências de repulsa e admiração. A inserção na moralidade islâmica dos povos subjugados e dos missionários católicos por meio da conversão forçada ou não ajuda a compreender como se deu o processo de construção de linhagens fundadoras do Estado mahdista, como aponta a autora.

O êxito da mahdiyya foi decorrente uma conjunção de fatores ligados à mística sufi, da inserção e incorporação de povos não árabes em seus domínios, da apropriação de expedientes e vocabulários das práticas missionárias cristãs, da manutenção do tráfico de escravos, bem como da apropriação de estruturas militares e administrativas otomanas-egípcias e inglesas, num processo de incorporação de diversos elementos previamente existentes na criação do novo Estado singular e que conseguiu sobreviver até 1898, mesmo depois da morte do mahdi.

Nesse sentido, e ironicamente, é possível concluir que nas relações dos missionários católicos com o Estado mahdista o que a autora observa é que “a experiência mahdista, sobretudo a dos primeiros religiosos, abalou certezas sobre o que se conhecia no campo intelectual europeu a respeito da ‘limitações do oriental” (p. 178), sua ignorância e ingenuidade, e numa perspectiva historiográfica mais recente de avaliar o Estado Mahdista como “a primeira experiência sudanesa de Estado independente” (p. 175).

Samira Adel Osman – Professora no Departamento de História da Universidade Federal de São Paulo (UNIFESP – Guarulhos/Brasil). E-mail: samira.osman@unifesp.br


SANTOS, Patrício Teixeira. Fé, guerra e escravidão: uma história da conquista colonial do Sudão (1881-1898). São Paulo: FAP/UNIFESP, 2013. Resenha de: OSMAN, Samira Adel. Cristãos e Muçulmanos no Sudão: a experiência da Mahdiyya muito além da intolerância e do fanatismo religioso. Almanack, Guarulhos, n.7, p. 169-172, jan./jun., 2014.

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Fé, guerra e escravidão: uma história da conquista colonial do Sudão / Patricia T. Santos

Essa não é uma resenha convencional. Àqueles que desejam conhecer os principais argumentos e hipóteses que Patricia Teixeira Santos apresenta em sua obra sobre o Sudão sugiro o contato direto com o livro, sem mediadores. Por isso, esse texto não é uma resenha clássica, mas um convite à leitura de uma História que é ao mesmo tempo distante e vizinha de nós. A História é retratada na cultura árabe-islâmica como um instrumento sedutor de encantamento do outro, seja quando empregada de maneira literária ou político-institucional. Para a sociedade árabe, saber utilizar as palavras e conceitos históricos de maneira atraente é uma postura sediciosa, o que transforma todo e qualquer discurso sobre o passado em um jogo sutil que deve produzir fascínio no receptor do discurso. Na literatura árabe clássica, as referências ao poder arrebatador da História são incessantes. A obra mais difundida da cultura árabe-islâmica, conhecida no Ocidente como “Livro das mil e uma noites”, reforça o sentido prodigioso da palavra bem empregada ao transformar a filha do vizir (Scherazade) em uma personagem ardilosa que, pela sedução da História bem contada, supera a tirania política do rei Shariar e altera seu destino fatal. Todas as noites ao se deitar com seu próprio algoz, Scherazade converte o infortúnio em salvação recorrendo ao estratagema ainda hoje escasso aos historiadores arabistas: o de seduzir, respeitar e maravilhar o seu interlocutor. Ao longo de inúmeras noites em que a morte parecia ser o seu destino, Scherazade enfeitiça a todos, negociando ao final não somente a preservação de sua vida, como também a sua condição de rainha definitiva de um mundo mais livre e historicamente justo. Ao constatar que o trabalho historiográfico é um modo sedutor de agir sobre o mundo, como sugere Scherazade, pode-se afirmar que o Sudão mahdista de Patricia Teixeira Santos é uma longa noite dentre mil e uma, que se realiza na escolha assertiva de um tema pertinente ao encantamento do leitor. Aqui, não há gênios salvadores, heróis mambembes, nem odaliscas vaporosas, mas sim a velha conhecida missão civilizadora da Europa ocidental fantasiada de fé, guerra e escravidão. Leia Mais

Enseigner l’histoire à l’heure de l’ébranlement colonial. Soudan, Égypte, empire britannique (1943-1960) – SERI-HERSCH (RMMM)

SERI-HERSCH Iris. Enseigner l’histoire à l’heure de l’ébranlement colonial. Soudan, Égypte, empire britannique (1943-1960). Paris: IISMM – Karthala, 2018. 382p. Resenha de DUPONT, Anne-Laure. Remmm – Revue des Mondes Musulmans et de la Méditerranée, v.147, oct. 2010.

Ce solide ouvrage est issu d’une thèse de doctorat d’histoire, soutenue à Aix-Marseille Université en 2012 et primée par l’Institut d’études de l’islam et des sociétés du monde musulman en 2013. Il porte sur la réforme de l’histoire scolaire au Soudan anglo-égyptien dans les années 1940 et 1950, à la veille de l’indépendance effective le 1er janvier 1956. L’histoire scolaire s’entend ici comme l’histoire enseignée dans les écoles élémentaires – gouvernementales d’abord, missionnaires et privées soudanaises (ahliyya) ensuite, après leur nationalisation en 1957. En 1961, ces écoles, destinées aux 7-11 ans, accueillaient plus de 80 % des jeunes scolarisés au Soudan, du jardin d’enfant à l’université. C’est dire la légitimité d’une recherche centrée sur elles.

Le cœur de l’ouvrage consiste en l’étude de trois manuels de 2e, 3e et 4e années du cycle élémentaire, rédigés en arabe à l’intention des maîtres – tous soudanais – entre 1948 et 1950. L’entreprise fut menée sous les auspices de l’Institut pédagogique de Bakht er Ruda, créé en 1934 près d’Ed Dueim, à 200 km en amont de Khartoum – un sujet passionnant en soi. Le biais par lequel Iris Seri-Hersch aborde l’histoire scolaire est donc celui des programmes officiels et des prescriptions faites aux instituteurs pour les mettre en œuvre, pas celui de leur réception par les élèves. Ces programmes étaient, en 2e année, les inventions humaines de la Préhistoire à l’époque contemporaine, en 3e, les grands personnages de l’histoire, et en 4e, l’histoire du Soudan de la pénétration arabe au Condominium, les leçons les plus nombreuses portant sur la période mahdiste (1881-1898). Iris Seri-Hersch analyse avec minutie la genèse et le contenu des manuels, ainsi que les modalités de transmission et d’évaluation des enseignements qu’ils fixaient. Nourris de nouvelles approches éducatives, ils fournissaient aux maîtres des directives beaucoup plus nettes qu’en Grande-Bretagne même, ce qui amène l’auteur à se demander si la colonie n’était pas « “plus métropolitaine que la métropole” en matière de didactique de l’histoire » (p. 317).

L’objet semblerait petit s’il n’était inscrit dans une ambitieuse réflexion sur la transition de l’Empire britannique aux États-Nations et si le livre ne s’achevait par un chapitre, inspiré de la nouvelle histoire impériale, sur les convergences et les divergences entre l’histoire scolaire au Soudan et dans d’autres parties de l’Empire britannique : Ouganda, Nigéria, Rhodésie du Nord, Égypte, Inde et jusqu’à la métropole. Iris Seri-Hersch étudie l’histoire scolaire à l’heure de « l’ébranlement colonial », concept renvoyant à « l’évolution des représentations des acteurs vis-à-vis des régimes coloniaux, dont la vulnérabilité était ressentie, sinon reconnue », surtout à partir de la Seconde Guerre mondiale (p. 8). Ce faisant, elle jette un regard original sur « le développement des nationalismes dans les territoires colonisés » (p. 322). Elle restitue au Sudan Government dominé par les Britanniques et aux éducateurs coloniaux, britanniques ou soudanais, à son service un rôle central, non seulement dans l’élaboration d’un récit scolaire de l’histoire qui resta en vigueur, parfois avec des révisions, jusque dans les années 1970, mais aussi dans l’essor d’un des deux courants du nationalisme soudanais, le nationalisme indépendantiste, hostile à l’union avec l’Égypte. Elle aborde les années quarante et cinquante du XXe siècle sous l’angle, non de la confrontation entre nationalistes et puissance coloniale, mais d’un nouvel impérialisme britannique qu’elle qualifie de « paternaliste-progressiste ». Celui-ci avait pour but de transformer les Soudanais en une nation moderne et de les préparer à l’indépendance. Il se caractérisait par la collaboration avec les élites formées dans le système colonial, la mise en place d’institutions politiques assurant la transition vers le self-government, des campagnes d’alphabétisation des adultes, une expansion scolaire planifiée et le lancement de politiques de développement.

Sans doute ce « paternalisme progressiste » n’était-il pas propre au Soudan. L’originalité de ce dernier venait de la double tutelle anglaise et égyptienne qui s’y exerçait depuis 1899 et des forts contrastes, accentués par la politique coloniale de l’entre-deux-guerres, entre le Nord musulman et arabophone et le Sud (provinces de Bahr al-Ghazal, d’Equatoria et du Haut-Nil) animiste ou chrétien et multilingue. L’hostilité du Sudan Government à l’union du Soudan et de l’Égypte le conduisit à se rallier dès la fin de la Seconde Guerre mondiale au nationalisme indépendantiste : appelé aussi néo-mahdisme, celui-ci trouvait ses références dans la lutte du Mahdi et de ses partisans contre les « Turcs » ou Égyptiens, et dans l’État indigène qui en avait résulté de 1885 à 1898. En 1946, les Britanniques abandonnèrent la Southern Policy ou gestion différenciée du Nord et du Sud, et œuvrèrent désormais à la formation d’un État-Nation soudanais dans les limites du Condominium.

L’histoire enseignée à l’école reflète cette orientation. Ses finalités étaient nettes : diffuser des connaissances, donner aux jeunes Soudanais le sentiment qu’ils disposaient d’une patrie inscrite dans l’histoire large de l’humanité, éduquer les élèves à leurs responsabilités de futurs citoyens, participer à la « formation de leur caractère » (character-training / al-tadrīb al-khuluqī) en vue de leur entrée dans la modernité politique (cf. Seri-Hersch, 2020)Dans l’élaboration des programmes et des manuels, Soudanais et Britanniques, parmi lesquels Peter Holt, futur historien universitaire du Soudan, furent étroitement associés. Il en résulta un récit où s’équilibraient histoires soudanaise et islamique d’un côté, histoires européenne et mondiale de l’autre, et où divers points de vue sur le passé étaient juxtaposés. Si la révolte du Mahdi, par exemple, apparaît comme un mouvement de libération, le siège de Khartoum en 1884 est décrit, lui, du point de vue des assiégés et l’image héroïque de Charles Gordon en Angleterre reste intacte. Le successeur du Mahdi, le khalifa ‘Abdullāhi, est réhabilité mais ses erreurs, notamment l’effroyable famine de 1889, soulignées. Kitchener est célébré pour son génie logistique, facteur essentiel de la reconquête du Soudan en 1898, mais ses adversaires dépeints à sa mesure, comme d’authentiques patriotes. D’un manuel à l’autre, les élèves étaient susceptibles de s’identifier aussi bien au Mahdi qu’à Gordon, au chevalier Roland qu’à Ṭāriq b. Ziyād, aux esclaves soudanais qu’aux ancêtres de toute l’humanité. Jamais aux Égyptiens en revanche, jamais à Mehmet Ali, héros, à la même époque, des manuels d’histoire égyptiens. Dans le récit scolaire soudanais, l’Égyptien était toujours un étranger, porteur de tarbouche, obèse et corrompu.

6Les enseignements fondamentaux qu’Iris Seri-Hersch tire de cette analyse sont que le discours des manuels n’est ni homogène ni hégémonique, qu’il ne porte pas plus le point de vue du colonisateur que celui du colonisé, que, d’une manière générale, « l’orientation idéologique des récits scolaires produits en contexte colonial ou postcolonial ne peut être postulée a priori » et qu’il y a « des écarts conséquents entre décolonisation politique et décolonisation des récits scolaires » (p. 310 ; voir Seri-Hersch, 2017). Le fossé que les manuels laissent percevoir, tout en cherchant à le combler, n’est point entre Soudanais et Britanniques, mais entre Khartoumais (Soudanais du Nord et Britanniques) et Soudanais du Sud. Comme les régions situées en dehors de la vallée du Nil en général, le Sud-Soudan est peu traité et quand il l’est, il apparaît comme une terre lointaine, exotique, sauvage et peuplée de tribus. Les manuels ne font aucune allusion à la diversité des langues et religions soudanaises et présupposent que maîtres comme élèves sont tous musulmans. D’un côté, ils valorisent une ethnie (jins) et un territoire soudanais uniques, de l’autre ils réaffirment la dichotomie « Arabe » / « Noir » (‘Arabī / Zanjī) pour mieux la contester. S’ils évoquent enfin le sujet sensible de l’esclavage et de la traite, ils le font de telle sorte que les Soudanais du Nord s’en trouvent dédouanés et que tous les élèves puissent s’identifier aux victimes, face à des « marchands » jamais nommés.

7Mise en relation avec les politiques d’arabisation et d’islamisation du Sud dans les années 1950 et 1960 et les guerres qui en découlèrent, l’histoire scolaire de fin d’Empire prend ainsi un tour tragique. Elle contribua à l’éclatement de l’État-Nation qu’elle entendait construire. C’est sur ce triste constat qu’Iris-Seri Hersch clôt son excellente étude. On y déplore certes l’absence de bilan historiographique et d’index, ainsi que le non-classement des sources et de la bibliographie, conséquences, sans doute, de contraintes éditoriales fortes. On regrette en outre – c’est peut-être un effet de sources – que les acteurs égyptiens au Soudan soient marginalisés dans l’ouvrage. Si Iris Seri-Hersch décrit bien le contenu des manuels scolaires d’histoire en vigueur en Égypte dans la période, elle ne dit presque rien des écoles égyptiennes au Soudan, pourtant en concurrence directe avec celles du Sudan Government et peut-être elles aussi attachées à la formation du caractère – un thème qui avait fait fortune en Égypte dès le début du XXe siècle. L’ouvrage n’en instruit pas moins sur le Soudan, redonne toute sa place aux périodes précédant immédiatement l’indépendance des pays colonisés, amorce au passage une recherche sur l’histoire de la didactique de l’histoire et, par ses annexes et illustrations, met de nombreuses sources à la disposition du lecteur. Elle-même une vraie pédagogue, l’auteur s’exprime avec une grande fermeté et frappe par sa capacité à donner du sens à ce qu’elle fait.

[Referências]

SERI-HERSCH Iris, 2017, « Et si la rupture didactique précédait l’indépendance politique ? Revisiter la chronologie du Soudan contemporain au prisme de l’histoire enseignée à ses écoliers (1900-1970) », Histoire de l’éducation, n° 148, 2017/2, p. 119-142.

SERI-HERSCH Iris, 2020, “Civilising Teachers, Modernising the Sudanese: Colonial Education and Character Training in Postwar Sudan, 1945-1953”, Mayeur-Jaouen, Catherine, Adab and Modernity. A “Civilising Process”? (Sixteenth – Twenty-First Century), Leyde, Brill, p. 435-462.

Anne-Laure Dupont – Sorbonne Université Lettres ; Anne-Laure.Dupont[at]sorbonne-universite.fr

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